mercredi 30 juin 2010

Le chant du bourreau

Auteur : Norman Mailer
Editions : Robert Laffont (2008)
Nbre de pages : 1296

Quatrième de couverture :
Ce que nous raconte Norman Mailer dans ce livre, c'est la vie, les amours et la mort de Gary Gilmore, un assassin qui fascina l'Amérique. Meurtrier de deux étudiants à sa sortie de prison, Gilmore devait ensuite littéralement exiger son châtiment par fusillade... Le peloton d'exécution fût composé de volontaires, car cela se passe dans l'Utah, le pays des mormons, dernier réservoir de prophètes et d'anges vengeurs. Gilmore lui-même faisait partie de l'église de Jésus-Christ des saints des derniers jours ! C'est ainsi que, dans un récit à couper le souffle, Mailer nous dépeint son "héros" en train de se battre pour être fusillé : contre ses avocats qui veulent le sauver, contre les abolitionnistes en tout genre et contre les coutumes mêmes de l'Utah où - pas de chance - la peine de mort était tombée en désuétude.
Gilmore, "l'homme qui voulait mourir", était une proie rêvée, un sujet hors pair pour Mailer l'imprécateur. De cette vie là, il a fait un chef-d'oeuvre, le Crime et Châtiment de l'Ouest américain.

Mon avis :

Oui, vous avez bien vu, ce livre fait près de 1300 pages et j'ai mis un mois pour le lire tant les informations qu'il regorge sont riches et complexes par moment.

Ne vous enfuyez pas tout de suite parce qu'il vaut vraiment le détour et j'aimerais vous persuader de le lire malgré l'ampleur de la tache.

Le chant du bourreau n'est pas juste un livre sur un personnage qui a fait parler de lui suite à des meurtres qu'il a commis et pour lesquels il sera condamné à la peine capitale.

Gary Gilmore avait une personnalité bien à lui et malgré ce qu'il a fait, je n'ai jamais eu de ressentiment à son égard.

Norman Mailer, grâce à ce superbe ouvrage, qui lui a demandé des mois de recherches, nous explique au jour le jour la vie de Gary, son enfance, son adolescence, ses peines d'emprisonnement dans un centre de détention dès l'âge de 13 ans, ses relations avec l'ensemble de son entourage (qu'il soit familial ou amical) mais surtout la relation, fusionnelle, qu'il avait avec Nicole, celle pour qui il ressent une véritable passion.

Il nous explique (du moins il essaie d'analyser les choses) comment un homme ayant passé la moitié de sa vie entre les barreaux en est arrivé à l'irréparable.

Avec une écriture excellente et une forme journalistique, il retrace cette vie tourmentée.

Il s'appuie sur des témoignages, des interviews, des rencontres, des coupures de journaux, pour tout nous dévoiler. Enfin, presque tout car Gary Gilmore restera jusqu'au bout un être énigmatique doté d'une intelligence largement en deçà de la moyenne.

C'est un homme réfléchi, qui sait ce qu'il fait au moment où il le fait même si par la suite il ressentira du regret, de l'amertume pour ce qu'il est devenu et de la peine pour les familles en deuil; et en même temps il sait qu'il ne pourra pas changer. C'est la fatalité.

L'ouvrage est formé de deux parties qui exposent avec clarté et précision tout ce qui s'est déroulé avant, pendant et après les meurtres.

La deuxième partie est d'ailleurs concentrée sur le procès, les différentes voies de recours exercées tant par ses avocats que par différentes associations une fois la peine de mort prononcée et ce jusqu'à l'exécution effective de Gary Gilmore.

Le chant du bourreau c'est aussi et surtout la volonté d'un auteur de montrer comment fonctionne le système judiciaire américain. Comment les juges, les associations réagissent face à une telle condamnation.

C'est aussi un acharnement médiatique. C'est au premier journaliste qui arrivera à obtenir des informations sur le condamné ou ses proches, quitte à payer des milliers de dollars pour arriver à leur fin.

Si la première partie a été lue rapidement (quelques jours au bas mot), la seconde par contre a été plus ardue. Je ne pouvais pas lire plus d'une centaine de pages avant de faire une coupure avec un autre ouvrage. Il s'y passe tant de choses, tant de recherches et d'échanges, qu'il faut vraiment se concentrer dessus pour suivre les différents protagonistes qui interviennent.

Mais attention, il est impossible de ne pas le reprendre. Même si certains passages sont longs, il faut malgré tout poursuivre jusqu'au bout.

Ce livre est un chef-d'oeuvre tant par le contenu (la vie hors norme de Gary Gilmore ) que par le contenant. Norman Mailer a fait un travail de titan pour parvenir à bout de cet ouvrage. Je me devais de le terminer. Pour l'auteur. Pour Gary. Pour moi.

Je ne saurais quoi vous dire de plus que de vous mettre à cette lecture. La seule chose qu'il vous faut, c'est vous y préparer ! Il ne faut pas le prendre comme un simple livre de chevet. C'est plus complexe, plus profond lorsque l'on entre dedans.

Je ne regrette pas de l'avoir lu et je ne pourrai jamais l'oublier parce que Gary Gilmore reste un personnage très particulier et malgré tout ce qu'il a pu faire, il est extrêmement touchant, bouleversant et l'on se dit que si dès le départ sa vie avait été différente il n'en serait peut-être pas arrivé à de tels actes. Une vie affreusement gâchée par un destin qui s'acharne ! On n'en ressort pas sans être touché soi-même.

24 commentaires:

  1. Malgres la taille de ce "pavé" tu m'as convaincu ! Je vais profiter des vacances pour le lire.

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  2. @ Delph : Oh ben alors je te souhaite une excellente lecture et profites-en bien !

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  3. Toutes mes félicitations, pour la lecture et pour le billet. J'avais mis ce livre dans mon carton pour les vacances, mais comme il tient la place de trois, je l'ai enlevé... un jour peut-être...

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  4. Whaou ! Quel avis.
    Le moins que l'on puisse dire, c'est que tu sais convaincre ton monde. Après avoir lu, attentivement, cette chronique, je ne peux m'empêcher de vouloir lire ce pavé littéraire. J'ai toujours voulu comprendre la personne se cachant derrière un assassin, un criminel. Bien souvent, ils ont un passé chaotique, horrible... et même si l'on ne cautionne pas ce qu'ils ont fait, on arrive à les voir plus humain que le pense bien des gens ne connaissant et ne voulant pas connaitre, cet homme, cette femme.
    De plus, pour moi qui travaille dans le milieu socio-judiciaire (pour le moment), je suis curieuse de voir comment fonctionne le système judiciaire américain. Je pense en plus, que je côté écrit journalistique du livre peut-être un bon point positif...
    Alors oui, je compte bien le lire, mais je me le réserve pour cet hiver (moins chaud, plus tranquille...). Merci Belledenuit pour ce très beau et attractif avis.

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  5. @ Ys : Merci :) De toute façon, et très honnêtement, je ne pense pas que ce soit un livre à lire pendant des vacances... Mais j'espère vraiment que tu le liras un jour parce qu'à mon avis il devrait te plaire.

    @ Ellcrys : Tu as bien raison d'attendre l'hiver pour le découvrir. C'est un ouvrage qui me tentait depuis pas mal d'années et j'ai vraiment bien fait de le lire. Le système judiciaire américain est comme le pays : gigantesque et en même temps tu te dis pendant la lecture "pourquoi garder la peine de mort alors que peu de temps après la condamnation une multitude de juges et autres vont tout faire pour qu'il ne soit pas fusiller ?" C'est hallucinant de voir cette disparité entre les convictions, ce que la loi permet et ce que le côté humain se refuse d'accomplir. Je n'en suis pas encore remise.

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  6. Un roman que j'ai depuis des lunes et des lunes mais pas encore lu. Ton avis est superbe.

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  7. @ Suzanne : merci beaucoup. Un conseil : n'hésite pas à te lancer dans cette lecture. Je suis sûre que ça va te plaire ;)

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  8. J'ai découvert N. Mailer il y a peu avec "Un rêve américain", j'ai adoré. Depuis, "Les rivages de Barbaries" sont venues se rajouter à ma PAL, car les 1300 p. de celui-ci m'ont refroidi malgré les recommandations ! Je commence à regretter...

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  9. @ Pickwick : bah ben ce n'est que partie remise pour "Le chant du bourreau". Lance-toi quand tu te sentiras prête ;) Par contre, je file voir ton avis sur "Un rêve américain". Je ne compte pas m'arrêter avec cet auteur. J'ai beaucoup aimé sa façon de raconter l'histoire de Gary Gilmore et j'aimerais bien tenter un autre titre.

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  10. Je veux bien croire au chef-d'oeuvre, mais en ce moment, pas le temps de lire un pavé de 1300 pages... (mais je le note au cas-où, un de ces jours).
    J'aime bien le fond de ton blog !

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  11. @ Catherine : j'espère qu'un jour tu auras le temps de le découvrir (malgré ses 1300 pages !) :)

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  12. Les 1300 pages me rebutent mais ce livre m'a l'air très intéressant. En plus, si c'est une histoire vraie, c'est encore mieux car j'aime beaucoup ce genre de lecture.

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  13. @ Aurora : Ah oui c'est une histoire vraie : celle de la vie de Gary Gilmore. Il faut vraiment passer outre le nombre de pages. C'est vraiment un livre à découvrir pour tout ce qu'il contient.

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  14. Un auteur qui m'effraie encore mais Pickwick et toi allez finir par me convaincre !

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  15. @ Manu : Allez Manu ! Allez Manu ! Lance-toi ou l'a bien fait nous ;)

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  16. Mission réussie pour ce magnifique billet : le chant du bourreau est dans ma LAL.

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  17. Excellent commentaire. Je n’ai encore jamais lu de livres de Norman Mailer, mais tu m’as bien donné envie de le faire, même si effectivement, 1300 pages, cça fait un beau pavé. Merci pour cette découverte en tous cas...

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  18. @ Véro : Fais le passer dans ta PAL alors. Il est excellent !

    @ Alcapone : C'est vrai que ça fait long et certains passages sont longs et un peu "indigestes" mais franchement il vaut le détour. J'espère qu'un jour tu le découvriras.

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  20. @ Nanne : En tout cas, il me tarde que tu l'aies lu pour avoir ton ressenti dessus. J'ai noté d'autres titres de l'auteur. J'espère ne pas être déçue.

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  21. Un livre qui me fait terriblement envie surtout après un si bel avis! Je me le procure le plus vite possible, merci ma douce Belledenuit !

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  22. @ Morrison : mais je t'en prie cher ami. J'ai hâte de lire ton avis dessus. Je suis sûre que ça va te plaire ;)

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  23. J'adore Mailer et le chant du Bourreau reste pour moi le meilleur!!!

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  24. Et bien, justement si: c'est un livre à lire durant les vacances parce que :
    1: on a le temps devant soi
    2:on a l'esprit dépollué des sollicitations du quotidien
    3:quand on aime, on ne compte pas....

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